Où j’observe aux jumelles des mouflons corses importés devenus auvergnats et revendiquant fièrement leur territoire.
J’attends jumelles rivées sur les yeux. Je ne bougerais pas sans les avoir vus. Importés de Corse et ré-introduits dans les années 1970 ils sont aujourd’hui environ quatre cents à s’adonner à l’alpinisme. De vrais pros. Rien, je patiente en vidant mon dernier sachet de fruits secs, l’immensité du paysage devant mes yeux me fait oublier la baisse de la note de la France par les agences de notation anglo-saxonnes. Je me console comme je peux en les attendant, toujours rien, je ne dois pas les mériter au bout de deux heures d’attente, je comprends le message en finissant la noisette orpheline au fond de mon sachet. Je la mâche lentement en observant les rochers et leur cinquante nuances de gris et les pelouses subalpines juste en dessous d’un vert à l’intensité fluo. C’est ma journée de marche où je marcherais le moins, attendre est aussi un plaisir. Je patiente en observant des rapaces, deux marmottes et surtout ce vert intense de pelouses que jamais les petits bourgeois d’aucun pays ne pourront reproduire devant leur pavillon. C’est satisfaisant, une couleur exclusive pour un lieu spécifique.
Fin d’après-midi je ne suis plus seule, des couples, des familles, des petits groupes prennent position, équipés en apéro en grignotage et en jumelles pour assister au spectacle. Trente minutes plus tard les mouflons sont là. Incroyable. Il y a-t-il un horaire de lâcher de mouflons ? Est-il imprimé dans un guide que les mouflons arrivent exactement à 17h45 ?
Élisabeth Sierra : https://editionsjou.net/elisabeth-sierra/
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